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Côte d’Ivoire/ Des parents d’élèves refusent d’envoyer leurs enfants dans les collèges de proximité du Gôh (Enquête)

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Gagnoa, 30 juin 2024 (AIP)–  L’Etat de Côte d’Ivoire, pour garantir le succès de sa politique de l’école obligatoire, a mis en place plusieurs instruments dont les collèges de proximité, pour rapprocher les établissements secondaires des populations rurales. Si l’initiative est bien appréciée ailleurs, ce n’est pas le cas dans la région du Gôh où de nombreux parents disent non. Enquête sur leurs motivations.

Avec l’arrivée à la tête de la Côte d’Ivoire en 2011 du président Alassane Ouattara, un vaste programme de construction de collèges de proximité a été lancé sur toute l’étendue du territoire national. Au total, une quinzaine construite, dont 10 par le conseil régional du Gôh, dans les départements de Gagnoa et Oumé.

Ce programme a été conçu pour offrir l’opportunité à l’immense majorité des enfants des zones rurales de fréquenter non loin de leurs villages et à côté des parents. Malheureusement, le constat sur le terrain montre que certains parents font de la résistance et refusent d’envoyer leurs progénitures fréquenter ces établissements d’enseignement général publics à base 2 évolutive, dits de proximité. Ces derniers préfèrent  la grande ville ou les écoles privées, comme c’est le cas à Ouragahio, Gnagbodougnoa, Tonla, etc.

« Comment comprendre que chaque matin, par dizaines, de jeunes enfants, à pied et/ou à vélo, passent devant moi ici au collège Dominique Ouattara de Ouragahio, pour se rendre au  lycée de Ouragahio, au centre-ville, ou encore aux collèges privés », déplore l’Adjoint au chef d’établissement (ACE) du collège de proximité Dominique Ouattara de Karahi (3 k m de Ouragahio), dame Akré Jacqueline. Elle dit s’interroger quant à l’attitude de nombreux parents de ces zones, qui préfèrent inscrire leurs enfants ailleurs qu’au collège le plus proche de leur village, celui de Dominique Ouattara. Un établissement pourtant flambant neuf et bien équipé, et qui tourne « malheureusement », selon elle, en sous-effectif.

Mme Akré note que le vivier d’écoliers des classes de Cours moyen 2, qui habite les villages de Karahi, Bodocipa, Oundjibipa, Krogbopa, et Mama, sur l’axe  Karahi-Mama suffit à couvrir les 200 places de sixième de son collège. Mais, à l’ouverture officielle de l’établissement en 2021-2022, au total 120 élèves s’y étaient fait affecter, contre 106 en 2022-2023. Pour l’actuelle saison 2023-2024, l’ACE a communiqué le chiffre de 47 élèves. Conséquence, la première promotion dudit collège, qui est en classe de quatrième, ne compte que 26 apprenants. Et sur les 16 classes physiques construites, seules cinq sont occupées, regrette un collaborateur de l’ACE. Il explique que l’établissement est contraint d’acheter des produits pour lutter contre les termites qui ont commencé à détruire les tables-bancs de chacune des classes non utilisées.

Mais pour Georges Koudou, propriétaire d’un magasin de vente de bouteilles de gaz dans la ville de Ouragahio, il n’y a pas de choix à faire entre le lycée, certes en sureffectif, mais qui est en pleine ville et un autre établissement secondaire, dans un village à 3 km, « fut-il beau et neuf ». Il justifie ainsi le choix des parents de renoncer au collège de proximité pour le lycée d’Ouragahio, ou à défaut, les établissements privés.

La réponse de M. Koudou laisse perplexe Coulibaly Issa, chauffeur de car résident au quartier Dioulabougou-Ouragahio. S’il dit comprendre le choix des parents d’élèves résidents au centre-ville de Ouragahio, pour le lycée municipal, il dit s’expliquer difficilement l’attitude réfractaire des parents des villages de l’axe Karahi-Mama.

« C’est sûrement de l’ignorance et un manque de communication », rétorque-t-il. Selon lui, il faut poursuivre la sensibilisation. « Les parents d’élèves m’ont dit voir en cet établissement, un collège privé », a réagi le Chef du village de Bodocipa, Ozigokou Sokouri Aimé, dont la localité est sur l’axe Karahi-Mama. « C’est tellement beau qu’ils le fuient », a révélé le chef de village.

Une rencontre parents d’élèves-administration a eu lieu peu après les examens du Certificat d’études primaires élémentaires (CEPE) 2024 et ces motifs ont été évoqués. Le principal a réaffirmé qu’il est demandé aux parents d’élèves de s’acquitter de 1000 FCFA comme frais de scolarité pour toute l’année, vu qu’il s’agit d’une école publique. « Prions que pour la rentrée 2024-2025, les choses aillent mieux », dit espérer le chef Ozigokou.

Sur la question, le maire de Ouragahio, Dr Pierre Dacoury-Tabley, par ailleurs pharmacien, envisage d’échanger avec les parents d’élèves des villages concernés et cela avant la rentrée 2024-2025. « Nous avons lutté pour obtenir ce collège. Qu’ils y amènent les enfants », plaide le maire.  

Face à cette situation qu’il juge  « incompréhensible », le directeur régional de l’Education nationale et de l’Alphabétisation (DRENA) de Gagnoa, Konan Yéboué Emmanuel, évoque une impuissance de l’administration.

« Nous ne pouvons pas obliger un parent à affecter son enfant dans l’établissement que nous jugeons plus approprié pour ses études », fait observer M. Konan.

Sans donner de chiffre précis, le directeur du Centre d’information et d’orientation (CIO) de Gagnoa, Dongo Kouamé Fidèle, note que depuis le lancement de l’opération des affectations en sixième en ligne par les parents eux-mêmes (2020-2021), on assiste à ce phénomène « curieux et qui relève d’aucune logique », dit-il.

« Mais c’est surtout un problème d’encadrement », insiste l’Inspecteur d’enseignement préscolaire et primaire (IEPP) Gagnoa-LONACI, Kouassi Yepié Faustin, dont le domaine de compétence s’étend aux villages du canton Paccolo (22 villages) ainsi que les villages situés sur la tronçon Gagnoa-Oumé. Enseignant de son état, il assure que si l’enfant est bien encadré au village, il peut obtenir de bons résultats. Idem, lorsque l’élève est en ville auprès d’un tuteur vigilant, et que l’enfant prend conscience de ses études. Il concède malgré tout, que parfois au village, il n’y a pas toujours de suivi des parents.

« Les parents, qui viennent me voir, disent redouter les mauvaises fréquentations de leurs enfants, avec les amis d’enfance, dont certains ont dû abandonner l’école au village », poursuit l’inspecteur. Même s’il dit exhorter les différents directeurs d’école sous sa juridiction à encourager les parents à faire le choix du collège de proximité du village, « parce que c’est mieux pour tous », il considère qu’il s’agit d’un problème « d’éducation et de responsabilité ».

Paul Dougrou, parent d’élève du village de Gnagbodougnoa, rencontré le 21 mai, le jour des épreuves écrites de l’examen du CEPE au groupe scolaire Soleil de Gagnoa, a réagi en pensant que. l’IEPP est dans son rôle de sensibilisation en faveur des collèges de proximité.

“Mais sur place, vous verrez que ce sont nos enfants qui animent toutes les funérailles, ainsi que les événements festifs au détriment des études », regrette M. Dougrou. Puis de concéder que s’il est vrai que le collège de proximité sauve les parents, « c’est aussi un gros risque », parce que, ironise-t-il, « certains de nos enfants qui n’ont pas encore compris qu’ils sont des collégiens, se comportent comme des élèves du CM3. »

Il explique avoir envoyé depuis trois ans, ses deux derniers enfants chez son petit-frère à Gagnoa, et « ça se passe assez bien », dit-il. L’homme relève qu’il est parfois utile que l’enfant soit loin des parents, pour être responsable.

« Quand j’étais au lycée de Gagnoa, je n’étais pas à l’internat, mais je m’en suis sorti», dit-il. Néanmoins, il reconnaît qu’il faut de la « maturité » chez l’enfant, pour ne pas qu’il tombe dans un groupe de mauvais amis. Une situation que l’on voulait éviter en l’envoyant poursuivre les cours en ville.

« Faire du CP1 au CM2 ici à Dodognoa, ça peut passer », soutient Kouakou Kouamé, planteur à Dodognoa. Mais il juge inapproprié que lui qui n’a pas été loin dans les études, puisse laisser son fils effectuer son secondaire au village.

« Gnagbodougnoa est certes une sous-préfecture, mais elle  présente des infrastructures insuffisantes, alors que l’enfant doit faire l’apprentissage de la vie en ville », a défendu le père. Il justifie ainsi son refus de laisser son fils sur place, dans l’établissement de proximité. « D’ailleurs, depuis deux ans, il est à Gagnoa, son petit-frère le rejoindra à la rentrée prochaine », insiste-t-il.

Le fils Kouakou Franck, en classe de 5ème au lycée moderne 2 de Gagnoa, ne donne pas un avis contraire. « Mon père n’a pas voulu que je poursuive mes études à Gnagbodougnoa. Il dit que Dodognoa où nous habitons et  Gnagbodougnoa où se trouve le collège sont tous deux des villages », lâche l’enfant. Kouakou Franck dit être chez un « tonton », à Gagnoa, qui est une connaissance de son père. « C’est difficile, mais papa dit d’y rester quand même », relève-t-il, tout en précisant avoir obtenu respectivement 12 et 11, 50 de moyenne sur 20 au premier et second trimestre.

Un autre élève, Zagbayou Edgard, du village de Bayékou Gbassi, en classe de quatrième au lycée moderne 1 de Gagnoa explique que son père n’a pas souhaité le voir fréquenter le collège de proximité de Dahiépa Kéhi, situé à deux km. « Il dit qu’il n’y a que trois jeunes enseignants, qui sont régulièrement en déplacement à Gagnoa, sous prétexte que les conditions de vie sont difficiles au village».

Ce que réfute le président du Conseil de gestion (COGES) de cet établissement, Biaka Roland, parlant plutôt de quatre enseignants bivalents, et un vacataire recruté pour les mathématiques. Tous sont logés dans une villa de cinq pièces d’un cadre qui est à l’étranger.

« Nous assurons les charges de l’eau et l’électricité, vu qu’ils n’ont pas encore leurs salaires, nous ont-ils dit », précise le président Biaka, même s’il dit reconnaitre que ce n’est pas toujours facile pour un jeune enseignant, de vivre au village.

Se prononçant sur les élèves qui font le choix des lycées en ville au lieu d’opter pour les établissements de proximité, plus près de leur village, le président du COGES du lycée moderne 1 de Gagnoa, Kouassi Legbo Roger, confirme qu’ils sont effectivement « très nombreux » dans son établissement. Lui aussi parle de la volonté des élèves de ne pas rester au village, parce qu’ils y ont déjà passé tout leur cycle primaire.

Par contre, il pense que les parents d’élèves sont « un peu faibles » en cédant à la pression des enfants. « C’est nous les parents, qui sommes responsables parce qu’en réalité, l’enfant ignore nos réalités financières », insiste Kouassi Roger.

« Je me souviens des enfants que je trouve dans les salles de classes, entre midi et 14h00, lors de mes rondes le lundi et mercredi, et qui s’ouvrent à moi. Mais, les COGES ne peuvent aider que l’imprévu, pas le quotidien », fait remarquer celui qui est aussi parent d’élève.

D’autres cas concernent ceux venus du village de Gnahio Dégoué, à trois km de Gagnoa. Il y a un collège, mais les enfants préfèrent venir dans un établissement qu’ils disent prestigieux, appelé ‘Lycée’, poursuit M. Kouassi. Il donne l’exemple de son propre fils qui a fait son entrée en sixième et qu’il a voulu inscrire dans un établissement proche de son village de Kribahio. Sa mère s’y est violemment opposée, au prétexte que son fils doit aller au lycée à Gagnoa.

« J’avoue que je n’ai pas compris cette obsession pour le lycée, ce d’autant plus que je ne dors pas à Gagnoa, je dors au village à Kribahio », s’irrite-t-il. « Je n’ai pas cédé », a insisté le président de COGES du lycée moderne 1.

Selon l’administration scolaire, de nombreux parents d’élèves, soit par négligence, soit par ignorance, ne procèdent pas à l’affectation en ligne de l’enfant. Pour la seule rentrée scolaire 2023-2024, il a été dénombré plus de 3 000 enfants dans toute la DRENA de Gagnoa, souligne le directeur du CIO. L’on parle alors de ratissage.

« Tout ça, c’est un complexe de riche », rétorque le vice-président du comité régional de Gagnoa du Réseau ivoirien pour la Promotion de l’Education pour tous (RIP-EPT), Diarrassouba Moussa. Il estime que peu de parents peuvent s’offrir le luxe de faire venir leurs enfants en ville, parce qu’ils ne souhaitent pas les voir effectuer l’intégralité du cursus secondaire en zone rurale où sont construits les collèges de proximité. « En vérité, je crois qu’ils fuient les conditions de vie et de travail des enseignants qui impactent sur le résultat de l’enfant. Mais ça, ils ne le vous disent pas », martèle-t-il.

Il a prit le cas du collège moderne de Zahibohio qui lui aussi est en sous-effectif d’élèves. Certes cette raison peut expliquer la désaffection, fait observer Bohui Godo, de l’inspection primaire de Bayota, mais il explique que certains parents du village de Gbigbikou à moins de deux km de Zahibohio et à trois km de Bayota, font le choix du lycée de Bayota pour un autre motif. Raison évoquée, martèle M. Bohui, les plus grands étant déjà au lycée, le père préfère envoyer le cadet dans le même établissement, afin que le grand frère veille sur le petit-frère.

Kouassi Guény, un parent d’élève diplômé retourné à la terre depuis 2012, à  Tonla (14 km de Diégonéfla), dans le département d’Oumé, a décidé par contre de percer l’abcès. Même s’il concède que le collège de proximité constitue une « bouée de sauvetage », il affirme que la majorité des professeurs du collège de proximité de Tonla, sont jeunes et vivent dans des conditions d’hébergement difficiles. Déjà peu nombreux, et « démotivés », ils ont pour souci principal, de chercher à se faire muter ailleurs dès leur arrivée, dit-il.

Syndicaliste, Ziao Sogba, secrétaire régional de la centrale syndicale Humanisme, enfonce le clou. « Oui, j’ai connaissance de ces nombreux cas de parents qui refusent les collèges de proximité au bénéfice du lycée en ville », dit-il d’emblée. La principale raison, soutient le leader syndical, est que les collèges de proximité qui ont été créés pour suppléer les lycées en ville, ne sont pas toujours fournis en enseignants, malgré l’affectation de nombreux enseignants bivalents.

« L’emploi du temps du bivalent ne lui permet pas toujours d’assurer convenablement les cours dans la seconde matière. J’ai fait un échantillonnage, et j’en suis arrivée à cette conclusion dit-il », note M. Ziao. Il révèle que pour l’enseignement du Français, et des mathématiques, les heures sont réduites parfois de cinq heures à trois heures par semaine, afin d’assurer les cours pour tous, vu le déficit d’enseignants. Il estime que les conditions ne sont pas réunies pour faire des cours « convenablement ». Résultats, déplore le syndicaliste, l’on dispense des cours pour simplement contenter les parents d’élèves. Ziao Sogba dit faire le constat que certains parents qui doutent de la bonne tenue des cours, préfèrent le lycée de Gagnoa, même si ceci pourrait engendrer des frais supplémentaires.

Redoutant sûrement une réaction de l’administration,  parce que n’ayant pas une autorisation formelle pour s’exprimer dans la presse, les enseignants approchés ne souhaitent pas se prononcer officiellement. L’un d’eux révèle néanmoins sous le couvert de l’anonymat  qu’il a pu trouver une maison « décente » de quatre pièces qu’ils louent à hauteur de 30 000 FCFA le loyer. Seul bémol, le propriétaire qui est à Abidjan, a conservé une chambre à l’intérieur de la maison.

« Lors de ces déplacements au village, pour raison de funérailles etc, il dort sur place, utilise mes fauteuils, regarde ma télé, prépare dans la cuisine, au prétexte qu’il est chez lui et laisse planer la menace qu’il peut récupérer à tout moment la maison », rapporte l’enseignant.

L’homme (Kouassi Gueny), qui semble être au fait de la situation, dit comprendre que des parents comme lui, ont fait l’option d’envoyer auprès de parents-tuteurs, leurs enfants vers le lycée d’Oumé qui est dans un département, au détriment du collège de Tonla, qui est dans une sous-préfecture.

M; Kouassi soutient, par ailleurs, que son enfant n’a pas toujours eu de professeurs de Français ou de mathématiques, dans les classes intermédiaires. S’il se réjouit qu’en classe de troisième, l’enfant a eu l’ensemble de ces enseignants, il continue d’affirmer que son fils est demeuré « handicapé » à l’examen du revet d’études du premier cycle (BEPC), dont les épreuves sont nationales. Il salue l’amour des études chez son fils, qui a obtenu son brevet d’étude.

Président de la Commission régionale des droits de l’homme, M. Diarrassouba rappelle que l’Etat a fait un effort pour créer des postes de professeurs bivalents. Mais il assure néanmoins que le problème posé par le parent d’élève (Kouassi Guény) est réel. Un minimum de sept enseignants bivalents est nécessaire pour ouvrir un collège, selon lui. Malgré tout, le collège moderne d’Oumé à la sortie de la ville, a ouvert avec quatre enseignants, dit-il.

« Et ce n’est un secret pour personne, il n’y a pas suffisamment de professeurs », selon lui. Ainsi, les parents d’élèves, qui dit-il, font l’analyse critique de la situation, préfèrent voir leurs enfants fréquenter le lycée moderne de Oumé, ou de Diégonéfla, qu’un collège de proximité, fut-il neuf.

Face à cette critique, un chef d’établissement lâche une confidence. « Lorsqu’un enseignant est affecté, il est recommandé de lui accorder une attention particulière en raison de leur effectif jugé insuffisant. Après trois années d’exercice, le jeune professeur a le droit de faire une demande de mutation dans les établissements placés sous l’administration de la DRENA, comme le recommande la règle.

Puis de révéler : « Bien que j’accepte la demande, et y mentionne ‘Avis favorable’ je ne la transmets pas à la hiérarchie, par crainte d’accroître mon déficit déjà criant d’enseignant », poursuit le chef d’établissement. Il explique que la situation demeure en l’état, jusqu’à ce qu’il ait trouvé un autre enseignant. L’homme  reconnaît que cette attitude est « illégale et incorrecte ». Seulement, il confesse que s’il accède à la demande de mutation de son enseignant, il court le risque de se mettre à la recherche d’un enseignant bénévole. Non seulement, selon lui, il n’est pas facile de trouver un bon enseignant bénévole qui soit de qualité, mais en plus, les fonds COGES ne sont pas toujours suffisants pour faire face au paiement, et de surcroît à temps.

Toute chose que confirme le président du COGES du collège de Dahiépa Kéhi, qui rappelle qu’il a dû recruter un enseignant bénévole de mathématiques en 2023-2024, pour pallier l’absence de prof. « Malheureusement », la subvention n’ayant pas été versée jusqu’à la fin de l’année scolaire, il a dû s’endetter à hauteur de 250 000 FCFA pour payer une partie des émoluments annuels du bénévole.

Concernant les enseignants en sous effectifs, le directeur régional Yoboué Konan  exhorte les professeurs à se motiver, en s’imprégnant des réalités locales. Il fait remarquer que l’Etat de Côte d’Ivoire ne peut pas se payer le luxe de diligenter une enquête pour chaque enseignant sorti de l’Ecole normale supérieure (ENS) avant de procéder à son affectation. Ceci, au motif de rechercher parmi eux, ceux qui auraient grandi au village ou en ville !

« Beaucoup sont décontenancés, dès qu’ils sont affectés dans une localité à des dizaines de kilomètres de la voie nationale », s’inquiète le DRENA. « Acceptez vos lieux d’affectation et vous finirez par vous y habituez. Mais si vous résistez, vous aurez du mal à vous adapter et les résultats chez l’enfant s’en feront ressentir », a-t-il conseillé aux jeunes enseignants. Néanmoins, il invite les cadres à jouer leur partition pour l’éducation nationale, en construisant des logements décents dans ces sous-préfectures et gros villages qui abritent les collèges de proximité.

Ziao Sogba, en bon syndicaliste, dénonce aussi l’attitude de quelques professeurs dans les localités villageoises. « Vous parlez de conditions de vie difficiles, alors que des instituteurs et sages-femmes vivent sur place dans ces localités depuis plusieurs années et ils sont aussi des fonctionnaires », s’irrite le leader syndical. A son niveau, poursuit-il, ce qu’il considère comme défendable, c’est lorsque le professeur indique qu’il lui est impossible d’assurer les cours, du fait d’absence de logement à louer.

L’état dans lequel les collèges de proximité sont livrés après construction, est aussi pointé du doigt, comme un facteur de découragement des parents d’élèves qui tournent le dos à ces établissements. « Je déplore l’engagement minimal des conseils régionaux », a martèlé le président  de la Commission régionale des droits de l’Homme (CRDH), qui parle de « juste des murs et un tableau », avec des tables-bancs insuffisants.

« Cette information n’est pas exacte », a réagi le directeur de cabinet du président du Conseil régional du Gôh, Ottey Ossoua Emmanuel. Il explique que la politique du conseil est de construire pour la première année, trois classes avec plafond, un bâtiment administratif et des latrines, pour un coût d’environ 100 millions CFA, y compris l’aménagement du site pour un collège de base trois. Il est ensuite livré des tables bancs et bureaux, parfois avec des ordinateurs.

Selon M. Ossoua, la clef de répartition revient à la DRENA, en fonction de ces besoins. A l’année N+ 1, trois autres classes sont construites et ainsi de suite, jusqu’à atteindre la classe de troisième, pour un coût global de 210 millions FCFA. Par contre, dit-il, « l’essentiel des fournitures et matériel didactiques relève de la compétence des COGES », précise-t-il.

Au contraire de tout ce constat amer, le principal du collège de Djédjédigbeupa, (à 17 km de Gagnoa) Aguia Abolé, exprime sa joie depuis l’ouverture de son établissement en 2022. « A mon arrivée, nombreux sont les parents qui ont par contre demandé la mutation de leurs enfants, des lycées de Gagnoa vers  Djédjédigbeupa », s’est félicité le principal.

L’administration scolaire poursuit la sensibilisation des parents d’élèves à réviser leur position. Elle explique qu’à partir de la rentrée scolaire 2024-2025, l’affectation en seconde en ligne par les parents, ne sera plus en phases pilotes, mais bien appliquée à l’échelle nationale. « Et tous ensemble, nous nous devons de nous y préparer sérieusement », fait observer le DRENA.

(AIP)

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